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vendredi 15 octobre 2010

TROP, TROP, TROP, C'EST TROP BON !

Tasukete! Au secours !
Ce voyage s'accélère comme un manège de fête foraine et je ne trouve plus le temps de le vivre et d'updater le blongonzo dans les pauvres 24 heures d'une journée. Celles-ci ne sont pas bien remplies, elle débordent ! A vrai dire ça ressemble par certains côtés à une sesshin zen (pour ceux qui connaissent ) en plus speed dans le sens où les évènements, plaisirs et obligations s'y enchainent sans répit et que nous pratiquons le lâcher-prise en suivant scrupuleusement le programme de la déesse de Shikoku Muchijin, Ozaki Mie san.

Donc je ne vais pas courir après le temps, la chronologie on s'en fout et je raconterai plus tard les expériences marquantes déja passées, un o-chaji, une cérémonie du thé dans des conditions exceptionnelles ou le plaisir du pinceau à l'encre façon sumi-e free style chez un vénérable calligraphe au style punk et toujours vert (comme le thé LOL) à 70 ans.

Comme le sujet principal de ce voyage c'est le pélérinage du Henrô, rentrons dans le vif du sujet, vu que j'écris dans le silence de la nuit devant la fenêtre qui donne sur le parc, les statues de Kôbô Daishi et des patriarches, the perfect spot.

Nous sommes arrivés hier soir à Zentsuji, lieu de naissance de Kôbô Daishi, le 8e patriarche de l'école bouddhiste Shingon qui l'a introduit au Japon depuis la Chine au VIIe siècle, et est considéré comme une des figures majeures de l'histoire japonaise. Après sa mort en 835 ou plutt son "entrée dans la méditation éternelle" et sa consécration par l'empereur Daigo en 921, il semble être devenu un être de légende, à qui on prète encore aujourd'hui moult miracles, pouvoirs, hauts faits et actes fondateurs de la civilisation japonaise comme l'importation des kanji chinois, l'invention et l'ajout des hiragana pour les adapter à la grammaire japonaise.

C'est donc sur les traces d'une légende et d'un saint bouddhique que les japonais depuis mille ans parcourent le pèlerinage circulaire des 88 temples Shingon de Shikoku, la plus petite des îles qui composent le Japon et aussi la plus à l'écart des grandes routes de communication de l'archipel.

On débarque donc entre chien et loup les yeux écarquillées avec nos bagages depuis le big hotel moderne de Marugame pour se retrouver au milieu d'un vaste ensemble de temples, statues, autels, pagode, parc, bref un petit Vatican du Shingon. C'est leur 3e centre en importance, le premier étant le Kôyan-san, montagne célèbre au sud d'Osaka pour 117 temples  qui accueillent des miiiers de pèlerins et visiteurs.
Shingon (眞言 ou 真言) est une école bouddhiste vajrayâna japonaise, fondée au VIIIe siècle par le moine Kūkai (空海) qui reçut le titre posthume de Kobo Daishi, le grand instructeur de la Loi
Le mot Shingon signifie « parole vraie »; c'est la traduction japonaise du mot sanscrit mantra qui désigne la prière mystique en Inde.
Son idéal se résume dans la phrase « Sokushin-Jôboutsu », qui signifie « devenir bouddha dans cette vie avec ce corps ». C'est en purifiant le cœur de ses passions parasites, en cultivant modestie, simplicité, pureté, concentration qu'il devient possible d'exprimer avec naturel notre "nature de Bouddha".
Le mental calmé, les peurs et les désirs laissés de côté, nous pouvons agir et créer avec spontanéité.

A peine les bagages déposés dans un bâtiment ultramoderne qui rassemble chambres pour pélerins, salles d'activités diverses et lieux de cultes attenants, nous nous sommes retrouvés assis dans un réfectoire où quelques dizaines de pèlerins du 3e voire du 4e âge habillés en yukata étaient attablés devant un dîner on ne peut plus japonais et donc délicieux et raffiné, plein de petites merveilles à déguster, sashimis et nabé compris.
Ensuite les bloggers et leur guide interprète en anglais, le sympathique Masuda san, sont allés aux bains avant d'aller remplir leur devoir sur le net tard dans la nuit tiède. Moi c'était 3 heures du mat' et un lever à 5H 30 pour un office à 6 heures, gasp ! Bénies soient les vending machines du rdc et leur café chaud bu au radar!
Arrivés bons derniers comme d'hab' et à cause des Gaudins père et fils toujours limite-limite sur les horaires, nous avons été placés au premier rang mais sur le coté de l'estrade/autel richement décoré de rouge et or.  Assis par terre en seiza ou en zazen  avec tous les papys et mamies de la veille au soir en tenues blanches tradi (comme nous d'ailleurs) nous avons assisté à l'arrivée des moines et nonnes et du vénérable, précédé exactement comme dans le zen par un moine  frappant régulièrement une clochette. Ting !
Surprise, le boss c'est le japonais à la tête sympa que nous avons vu tout nu hier soir tout seul aux bain, quand il s'est levé, intrigué, pour voir qui rentrait à cette heure tardive en parlant un charabia peu courant ici. C'est toujours frais de voir un grand maître à poil avant de le voir en grande tenue !
Fort charisme et enseignement d'une demie-heure sur l'histoire de Kôbô Daishi, suivi de récitation de sutras repris ou non par l'assistance. C'était sympa de jouer le jeu et sans comprendre de répéter les sons que j'entendais à l'unisson des autres pèlerins. Puis il y a eu l'Hanny Shingyo, easy facile, alors le journaliste qui devait nos interviewer après s'est mis à shooter ces français bizarres qui venaient participer à une cérémonie Shingon. Je me sentais moi même assez exotique haha.




Voilà l'article le lendemain dans Sinyö Shinbun.



Les moines et nonnes étaient habillés d'une kolomo d'un bleu intense comme celui que l'on trouve à la Villa Majorelle à Marrakech et d'un kesa d'un jaune d'or étonnant mais il y en avait quand même un qui a dormi tout le temps LOL.
Après ces sutras http://www.youtube.com/watch?v=A1evxMA7yYw un plus jeune  a pris le relais visiblement pour vendre un truc aux pèlerins mais là j'ai zappé. Par contre après la cérémonie on a fait un truc étonnant : descendre à la queue-leu-leu dans un noir corridor d'abord décoré de figures classiques bouddhiques puis dans la  pénombre et enfin dans le noir total. Pas effrayant mais surprenant lorsqu'on marche en aveugle dans un étroit couloir avec des inconnus, une expérience sensorielle de mort bien vue pour frapper l'imagination, très fort comme mise en scène , on tourne sans rien voir du tout puis une faible lueur apparait et on rentre dans une  petite pièce peu éclairée mais réconfortante  où se trouve une statue de Kôbô Daishi et un autel. On repart dans le noir puis on débouche de l'autre coté de l'autel, fin de l'expérience sensorielle de la rencontre avec le saint au royaume des morts. Chapeau l'entertainment !
Difficile de répondre ensuite aux questions du journaliste…

Le petit dej' ultra classique japonais avec riz, soupe miso, poisson grillé mais sans croissants beurre ou café-crème (que l'on le retrouve anyway dans les vending machines ) nous a remis dans la réalité ne boostant nos papilles. Le poisson grillé  et le radis daikon le matin, nous, les bloggers, on adore !

En route, notre premier temple n'est qu'à quelques dizaines de metre, ça va, on n'a pas à marcher beaucoup.
On s'est initié vite fait à l'étiquette en vigueur pour la visite des temples:
1-En franchissant la porte principale on s'incline en direction du Bouddha hall principal, le Hondô.
2- On va se purifier à la fontaine, d'abord la main gauche, puis la droite, puis la bouche. On s'arrête là, stop, on considère que le reste est ok.
3- On sonne la grosse cloche, le bonshô . Si on la sonne quand on part, gaffe ça porte malheur.
4- Devant le Hondô où se trouve la figure bouddhique consacrée du lieu, on allume de l'encens et une bougie. On sonne la petite cloche accrochée haut par une corde, on place son osame-fuda, son nom et ses souhaits dans une boite en métal devant l'autel, on balance une pièce dans un coffre en bois et on fait gassho en chantant l'Hannya Shingyô, le sutra de la Grande sagesse et d'autres sutras shingon (ou pas) . Normalement il y a un ordre et certains sutras sont répétés mais bon on n'est pas obligé non plus et les pratiques varient. Moi j'aime bien chanter l'Hannya Shingyo par cœur en suivant celui des pèlerins qui lisent tous leur sutra-book haha quel frimeur Maître Banane.
5- On fait la même chose devant le Daishi hall,  toujours dédié à Kôbô Daishi.
6- On va faire signer et tamponner son carnet de pèlerinage au bureau des tampons ou en échange de sousous on a une belle calligraphie sur la page dédié au temple.
6- On sort par la porte principal on se retourne et on salue.

Bordel c'est pas compliqué quand même! Mais bon il faut se mettre dans l'ambiance, c'est facile d'oublier un truc si on enchaine les temples au pas de charge en Ferrari.


Bref après nous sommes partis parti avec la voiture de Yuki san, notre guide interprète parlant français, au temple Motoyamaji, puis de là pour notre première grande marche, 12/13 km, dans paysage campagnard stylé façon  "Mon voisin Totoro".

Une merveille d'immersion dans un Japon rural comme on n'en fait plus, le moule est cassé : rizières, petites maisons, réservoirs et systèmes d'irrigation complexes, minuscules machines agricoles ressemblant à des jouets, minuscules mémés en scooter bizarres, dans un plaine fertile et tranquilou entourée des typiques montagnes japonaises, si jeunes que la végétation les recouvre et le tout sous un soleil éclatant.

Et puis on a eu dès le début la surprise de rencontrer des personnes (âgées) qui avaient vu la veille au soir le reportage tv aux infos locales sur les 3 bloggers français et qui nous couraient après pour nous donner des o-settai, les offrandes traditionnelles au pèlerins.




Voilà mon premier o-settai, offrande aux pèlerins, des petits gateaux façon crêpes, mon ventre dit miam !


Dingue ! On n'est là que depuis 3 jours et grâce au talent de communication de Mie Ozaki, nous sommes presque aussi célèbres à Shikoku que Jean Réno ! ROTF!

3 commentaires:

  1. En te lisant, je me demande si j'aurai dû choisir ce pélerinage au lieu de l'ango ;-) Je serai là-bas dans deux semaines précises. Bonne continuation sur ta voie de pélerin!

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  2. Ouais, c'est sur que le henro c'est ideal pour ceux qui sont sur le Voie et plus marrant que nos dojo dans les caves zen de Paris ou Bruxelles ! Faut organiser des henrô pour la sangha IMO.

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